Chapitre 34

-       Comment ça se passe ton travail d’assistant ? demande Marie alors que je suis en train de balayer la salle de restaurant.

-       Ça va, dis-je. Pour l’instant, je ne fais que des choses simples, mais ça me va très bien. Après tout, je suis un novice, comparé aux autres.

-       Mais tu espères faire plus, n’est-ce pas ?

-       Oui, bien sûr. Mais ça ne fait que deux semaines que je travaille, je ne peux pas être impatient.

-       C’est vrai, dit Marie. Chaque chose en son temps, comme on dit. Et ça va, tu n’es pas trop fatigué ? Tu enchaines ton travail d’assistant et celui du restaurant. Si jamais ça fait trop pour toi, n’hésite pas à le dire. Tu n’as pas eu une minute à toi depuis que tu es arrivé.

-       Je suis venu là pour travailler et puis, j’ai promis de vous aider et je tiens à tenir ma promesse.

-       C’est gentil, dit Marie en posant une main sur mon épaule. Tu es un bon garçon. Mais, n’en fais pas trop, il ne faudrait pas que tu t’uses la santé. Je sais que le métier de mangaka n’est pas évident.

-       Pour l’instant, je ne suis qu’un assistant, ce n’est pas vraiment moi qui ai la pression, mais Kaoru.

Ça pour avoir la pression, elle l’a. On est arrivé à la deadline en fin de semaine dernière et j’ai cru qu’elle allait se décomposer et exploser. Elle n’a jamais perdu son sourire, mais j’ai senti qu’en approchant du rendu, elle stressait de plus en plus et qu’elle était sur le point de rendre l’âme. Elle a travaillé presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre et ses cernes sous les yeux lui donnaient l’impression d’être un véritable zombie. Tout s’est accéléré durant les derniers jours et j’avoue que j’ai eu un peu de mal à suivre, mais je me suis accroché pour qu’elle puisse terminer sans trop de retard.

-       Tu as le temps de dessiner un peu pour toi ? demande Marie, alors qu’elle est en train d’essuyer une table.

-       Non, pas vraiment. Je n’ai pas encore trouvé mon rythme, mais quand ce sera fait, j’espère vraiment que j’aurais le temps de commencer mon nouveau manga.

-       Tu as déjà une idée ?

-       Oui, j’ai commencé à travailler le scénario et à élaborer le character design de certains personnages avant d’arriver ici. J’ai déjà bien avancé, mais maintenant, il faut que je trouve le temps de continuer.

-       Ça viendra, dit-elle.

-       Je vous vois beaucoup discuter et pas beaucoup travailler, dit soudain Akira qui vient de surgir près de nous.

Je sursaute. Il est parfois aussi discret qu’un ninja. Il arrive souvent derrière moi sans que je m’en aperçoive. Il surveille le moindre de mes gestes, c’est vraiment perturbant par moment.

-       Le service est fini, Akira, on peut bien discuter un peu en faisant le ménage.

-       Vous papotez, plus que vous ne récurez, nous fait remarquer Akira. Il commence à se faire tard et j’aimerais rentrer.

-       Ok ! Ok ! dit Marie. On accélère.

Elle me lance un sourire complice que je lui rends. Marie est vraiment très gentille et elle se comporte vraiment comme une mère d’adoption pour moi. Heureusement qu’elle est là, mais aussi Akira, parce que je ne sais pas si j’aurais vécu mon séjour aussi bien. J’avoue que je suis bien tombé et ce, grâce à Sayuri. Je ne la remercierai jamais assez de ce qu’elle a fait pour moi.

Ce qui me fait penser, que je dois appeler mes parents en rentrant, mais aussi Michaël qui a normalement participé à son premier match de basket en tant que professionnel. J’ai hâte de connaître le résultat et qu’il me donne ses premières impressions.

Nous terminons de nettoyer le restaurant et nous rentrons. Il est tard, mais avant d’aller me coucher, j’appelle en France via la visio de mon ordinateur. Je contacte d’abord mes parents et leur raconte ce qui s’est passé ces derniers jours. Comme d’habitude, eux, ont passé leur temps à travailler au laboratoire. Il y a des choses qui ne changent pas, mais d’un côté, ça me rassure. Ça me donne l’impression d’une certaine stabilité dans ma vie qui est loin de l’être en ce moment.